Loi Climat et Résilience publiée le 24 août 2021 : quelles sont les avancées ? Quel chemin reste-t-il à parcourir ?

Avec ses quelques 300 articles répartis dans 8 titres, la loi aborde un très grand nombre de sujets. Comme pour tous les textes de compromis, on peut voir le verre à moitié-vide comme le verre à moitié plein. La publication du rapport du GIEC début août sur le climat a confirmé la nécessité et l’urgence d’une action contre les émissions de tous les gaz à effet de serre : CO2 mais aussi méthane. L’Europe s’est donnée en juillet un objectif de réduction de ces émissions à -55% en 2030, ce qui implique une baisse de 47,5% pour la France au lieu de 40%. Ces deux éléments amènent certains à forcer le trait côté verre à moitié-vide.

Nous proposons dans cet article d’apporter un éclairage sur ce qu’il faut en retenir.

Premier élément positif, la loi ne se limite pas à la question du climat. Elle traite de sujets environnementaux importants :

–    La biodiversité apparait dans différentes mesures qui vont toutes dans le bon sens qu’il s’agisse de la réforme du code minier, de la lutte contre la bétonisation des sols ou du développement de l’agro-écologie ;

–    La lutte contre la pollution de l’air avec les zones à faibles émissions – mobilité (ZFE-m), l’arrêt du chauffage au fioul, l’encadrement du chauffage au bois ;

–    Le renforcement de la protection judiciaire de l’environnement : l’ensemble des sanctions sont augmentées et les pouvoirs de police de nombreux agents sont étendus.

La réforme du code minier était attendue depuis de nombreuses années et est impérative pour entériner des décisions telles que l’arrêt du projet de mine d’or en Guyane.

Deuxième élément positif, la loi présente un très grand nombre d’avancées concernant la rénovation énergétique des bâtiments (2ème poste d’émissions de gaz à effet de serre en France) : principalement les articles 148 à 180 du Titre “Se Loger ». Un de nos porteur de cause le souligne dans son dernier message dont nous extrayons quelques éléments :

–    Clarification et amélioration du diagnostic de performance énergétique (DPE) et des seuils d’attribution des catégories de performances (A à G),

–    Trajectoire d’élimination des passoires énergétique avec le gel des loyers, puis l’interdiction de la location,

–    Stabilisation des mécanismes d’aide par la mise en place d’une programmation pluriannuelle (2 fois 5 ans),

–    Définition de la rénovation énergétique performante et globale,

–    Obligation de procéder à un audit énergétique si le DPE est mauvais (d’abord F ou G puis graduellement jusqu’à D),

–    Renforcement de l’accompagnement à la rénovation et notamment par l’agrément d’opérateurs chargés de missions d’assistance à maîtrise d’ouvrage, avec la possibilité pour l’ANAH d’y participer

–    Obligation pour les copropriétés de se doter d’un plan pluriannuel de travaux à dix ans.

Troisième élément positif, un premier pas est fait sur l’adaptation au changement climatique avec les obligations liées au changement du trait de côte. Il s’agit de s’adapter à la hausse du niveau des océans qui débouchera sur la submersion des bâtiments. Il y aura bien d’autres adaptations nécessaires en lien avec les différents effets du dérèglement climatique : sécheresses, canicules, crues, submersions.

La loi se situe dans un continuum après la loi d’orientation des mobilités et la loi anti-gaspillage et en faveur de l’économie circulaire. C’est le sens de l’article 1 sur l’engagement de l’Etat à atteindre les objectifs de l’accord de Paris et du Pacte vert européen. Symbolique, il remet dans son contexte l’effort fait et celui qui reste à faire.

La loi devra se concrétiser par des décrets et arrêtés nombreux et des budgets cohérents lors de la prochaine loi de finance.

Enfin, la loi n’est pas tout : les différents acteurs publics (Etat, régions, collectivités locales) et privés devront s’emparer des dispositifs mis à disposition pour opérer une réelle Transformation écologique.

Les avancées contestées par les ONG sont nombreuses. En voici deux qui sont significatives des problèmes en suspens :

Le premier sujet de contestation concerne la transformation des mobilités. En France, c’est la première source d’émissions de gaz à effet de serre en raison de tous les véhicules à moteurs thermiques qui circulent. C’est aussi une très grande source de pollution de l’air avec les décès qui l’accompagnent.

Il s’agit de changer des pratiques encouragées depuis plus de 50 ans qu’il s’agisse du transport de marchandises par camions ou du transport des personnes en véhicules individuels (2, 3 ou 4 roues). La dimension émotionnelle du sujet est incontestable.

L’interdiction de publicité pour les énergies fossiles reste fortement critiquée car elle ne va pas assez loin et assez vite : ce qui était souhaité par beaucoup c’est l’interdiction de la publicité pour les véhicules à moteurs thermiques dès 2022. C’est cette mesure qui a été très médiatisée alors que le vrai débat porte sur la trajectoire de la fin de circulation de tous les véhicules à moteurs thermiques.

La fin de la vente des véhicules émettant plus de 95 g de CO2 par kilomètre (NEDC) est programmée pour 2030 dans la loi. Cela ne signifie pas la fin de leur circulation :  c’est un jalon pour l’industrie automobile.

C’est à l’aune de cette thématique que l’on peut mesurer l’importance de la question de l’acceptabilité sur le choix d’une date limite. Comment les Français vont-ils réagir à la perte de valeur de leur automobile ?

Par ailleurs, le rôle des régions et des collectivités locales est très important puisqu’elles organisent les mobilités et les investissements en infrastructures soutenant ou pas le passage vers les mobilités actives (vélo, marche) ou les transports en commun.

Le deuxième sujet sensible concerne la décarbonation de l’agriculture. Les sources d’émissions de gaz à effet de serre sont l’élevage industriel et l’usage des engrais azotés, d’où les mesures visant à développer les repas végétariens dans les cantines et la stratégie de réduction des engrais azotés. Les critiques fusent de toute part avec deux dimensions très différentes :

–    La consommation de viande est associée à la qualité de vie sur le plan émotionnel, même si sa surconsommation a des effets sur la santé et si la nourriture des animaux est issue de la déforestation,

–    La réduction des engrais azotés n’a pas été possible jusqu’à présent malgré toutes les trajectoires annoncées, tant par ce gouvernement que par ses prédécesseurs.

Dans les deux cas, le niveau Européen est le plus pertinent pour faire des avancées significatives grâce à la réglementation sur les véhicules et à la Politiques Agricole Commune : les sujets sont lancés et avancent. Le moment-clé c’est celui de la transposition en droit français de ces avancées. L’exemple du retrait du décret de transposition du contrôle technique des 2 roues motorisés cet été est un exemple de ce qui peut se passer, tout comme le non-respect de la directive Oiseaux en matière de chasse qui a fait l’objet de décisions du Conseil d’Etat.

Conclusion : La loi climat et résilience a eu le mérite de mettre sur le devant de la scène de nombreux sujets environnementaux. Elle n’est pas parfaite, mais elle fait avancer un certain nombre de sujets-clés. Pour rentrer dans le réel, la production des décrets qui y sont associés doit se faire rapidement. Il faut la percevoir comme une étape importante.

La prise de conscience du public s’améliore, mais cela rend-il l’acceptabilité de certains changements plus forte, en particulier sur l’automobile ou l’alimentation ?

Catherine Jagu, animatrice locale LREM Transition écologique

Sources :

– Loi publiée au journal Officiel :  https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000043956924

– Dossier de presse : https://www.ecologie.gouv.fr/sites/default/files/2021.08.24-DP_Loi_climat_promulguee.pdf

 

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